Le projet d’abrogation de la loi Ezzan
annoncé hier par le président du groupe parlementaire « Benno Bokk Yakaar »,
Moustapha Diakhaté, est selon le constitutionnaliste, juridiquement possible.
Il explique la procédure à suivre pour en arriver.
La possibilité d’abroger la loi Ezzan ne souffre
d’aucun doute. Du moins sur le plan strictement juridique. Selon le professeur
de droit constitutionnel, Abdoulaye Dièye, « sur le plan strictement
juridique, il y a une possibilité d’abroger cette loi ». Quand on abroge
cette loi, explique le professeur de droit constitutionnel, « elle est
censée n’avoir jamais existé. Même si elle avait pour objet d’amnistier des
faits, ces faits ne sont jamais amnistiés ». La procédure législative pour abroger cette
loi est simple. L’initiative peut venir des députés ou du président de la
république. Si l’initiative vient du président, dit-t-il, c’est un projet. Si
ca vient des députés, c’est une proposition de loi. La procédure commence par
le dépôt du projet ou de la proposition de loi sur le bureau de l’Assemblée
nationale. Le bureau va se prononcer et va saisir le président de la république
pour avis, si c’est une proposition de loi. Le président de la république va
donner son avis. Ensuite la procédure va continuer au niveau de l’Assemblée nationale,
par l’instruction du dossier au niveau des commissions, avant qu’elle ne passe
devant la plénière. Si la loi est adoptée, elle va être promulguée, s’il
n’y a pas de recours contre cette loi. Parce que, précise M. Dèye, les députés
peuvent déposer un recours. Ils peuvent demander au Conseil constitutionnel de
se prononcer sur la constitutionnalité de cette loi. S’il n’y a pas de recours
ou si le Conseil constitutionnel, dit que la loi est bonne, elle sera
promulguée, puis publiée et deviendra une loi, qui va abroger la loi Ezzan.
Cependant, d’un point de vue morale, le Pr Dièye, se demande si on peut revenir
sur ce qui était censé avoir été effacé. Parce qu’explique-t-il, la différence
entre la grâce et l’amnistie est que la grâce ne fait qu’effacer la peine alors
que l’amnistie efface l’infraction. Donc la loi Ezzan, tant qu’elle existait,
elle était supposée avoir effacé l’infraction. Maintenant, se demande-t-il, sur le plan strictement moral, est-ce qu’on
peut revenir sur ce qui était censé avoir été effacé. Voilà le problème que va
poser l’abrogation de la loi Ezzan de l’avis du professeur de droit
constitutionnaliste Abdoulaye Dièye.
Pour rappel, le jeudi 17 février 2005, l’ancien
président de la république du Sénégal, Me Abdoulaye Wade, a promulgué la loi
Ezzan (du nom du défunt député libéral Isodore Ezzan), adoptée par l’Assemblée
nationale le 7 janvier 2005 par 70 voix contre 20. Cette loi a amnistié tous
les auteurs et commanditaires de crimes et délits en relation avec les
élections de 1993 à 2004. Parmi ces crimes ainsi amnistiés par la loi Ezzan,
figurent en bonne place l’assassinat de l’ancien président du Conseil
Constitutionnel du Sénégal, Me Babacar Sèye à l’élection présidentielle de
1993.
HAROUNA
FALL
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