vendredi 7 juin 2013

ACTE III DE LA DECENTRALISATION: LES CONTOURS ET INCIDENCES D'UNE REFORME



L’Acte III de la décentralisation vise à organiser le Sénégal en « territoires viables, compétitifs et porteurs de développement durable », sonne comme une révolution locale. Ousmane Badiane, membre du comité national de pilotage de la réforme de l’Acte III de la décentralisation fixe certains contours et incidences de cette réforme.

 

Lancé le 19 mars 2013 par le chef de l’Etat Macky Sall, l’Acte III de la décentralisation vise à organiser le Sénégal en « territoires viables compétitifs et porteurs de développement durable ». L’Acte III de la décentralisation est le troisième du genre dans la politique de décentralisation au Sénégal depuis l’Indépendance. Si l’acte III  est appliqué, il va changer beaucoup de choses dans la façon dont la décentralisation est conçue jusqu’ici. Membre du comité de suivi évaluation du comité national de pilotage de la réforme de la décentralisation, Ousmane Badiane, en fixe certains de ces contours. Pour lui, cet acte doit être adossé à une approche territoriale des politiques publiques. C’est-à-dire à une « territorialisation des politiques publiques ». Partir des exigences exprimées à la base par les populations pour formuler des offres pertinentes de service public. Il s’agira à travers l’acte III, comme il dit le concevoir, de réexaminer beaucoup de choses.

Redéfinition de la carte administrative. Avec l’acte III de la décentralisation, la carte administrative et la carte des collectivités locales seront redéfinies. Aujourd’hui, le Sénégal a 14 régions, 387 communautés rurales, 172 communes, avec l’Acte III, dit-il, on va faire un redécoupage du territoire national à partir des zones éco-géographiques pour qu’on ait des pôles de développement avec une plus grande cohérence. Par exemple la zone  du Ferlo sera celle des questions sylvo-pastorale, la zone du Bassin arachidier, la zone du Sénégal Oriental avec les mines, la zone du Centre avec les phosphates, la Zone de la région verte de la Casamance. Si ces différentes nouvelles zones éco-géographiques seront définies, il y aura plusieurs échelles du territoire. Ce qui permettra aux collectivités locales de jouer un rôle plus important dans la mesure où elles seront de puissants pôles qui vont impulser ce que dit le Code des collectivités locales, c'est-à-dire le développement économique, culturel, social, sanitaire. Une mission dévolue aux collectivités locales, mais jusque-là, elle n’a pas été remplie.

Moyens matériels et financiers. L’Acte III permettra également à ces zones d’avoir davantage de moyens matériels et financiers. Parce que ce que l’Etat donne est assez faible. Or les collectivités locales avaient proposé, selon M. Badiane, à ce que cela soit relevé autour de 10 à 15% de la Tva. En plus de cela, chaque niveau de collectivités locales aura une fiscalité qui lui est propre. Parce qu’actuellement les régions n’ont pas de fiscalité propre. Si maintenant il y a une fiscalité propre à la région en plus de ce qui peut provenir de la coopération décentralisée, ces collectivités locales auront plus de moyens pour faire face aux 9 domaines de compétence qui leur sont transférés.  

Meilleure lecture de la carte sanitaire. Les entités nouvellement découpées dans le cadre de l’Acte III de la décentralisation, d’avoir une meilleure lecture de la carte sanitaire, de la carte scolaire. Parce que de l’avis d’Ousmane Badiane, il y a un manque d’harmonisation. La carte sanitaire ne correspond pas forcément au découpage administratif. Si on prend le district, qui est l’unité opérationnelle, dans la stratégie sanitaire, cela ne correspond pas forcément à une collectivité locale bien précise.

Fonction publique locale. Autre conséquence heureuse pour les collectivités locales, de l’Acte III permettra à ces collectivités locales d’avoir un personnel qui sera qui régie par les compétences transférées dans les différentes zones à leurs charges. Comme cela se fait au Mali et dans d’autres pays, où ce sont les collectivités locales qui gèrent les enseignants, le personnel de la santé. Cela sera accompagné d’une valorisation du statut de l’élu local. Aujourd’hui, il y a des missions confiées aux collectivités locales, mais aujourd’hui dans le système sénégalais, la coexistence entre la concentration et la décentralisation, il n’y a pas transfert concomitamment comme le dit la loi. Tout transfert de compétence doit être accompagné de transfert concomitamment de ressources, ce qui n’est pas le cas actuellement au Sénégal. M. Badiane pense qu’avec l’acte III de la décentralisation, il y aura transfert concomitamment de ressources aux collectivités locales et que les rapports décentralisation et déconcentration seront bien articulés. Il y aura un pouvoir local qui sera davantage exercé au niveau local, avec une véritable décentralisation qui quitte le sommet vers la base.

Participation citoyenne. Avec l’Acte III de la décentralisation, la participation citoyenne sera beaucoup plus active. Dans le dispositif institutionnel au niveau de l’Etat central, pour les populations locales, l’Etat central est éloigné. Parce qu’accéder au chef de l’Etat, au Pm, au gouvernement, à l’Assemblée nationale, au Ces, ce n’est pas donné à tous les citoyens, mais accéder au maire, au président du conseil régional, cela est beaucoup plus facile. Cela permettra une meilleure participation du citoyen à la vie de son terroir. La participation citoyenne aura  comme conséquence de pouvoir impulser une dynamique participative et partenariale, qui fera que les populations se sentiront concernées par les mesures qui seront prises dans la mesure où elles seront exécutées dans une démarche de proximité.

 

Délai ? A la question de savoir si c’est possible de terminer ces travaux avant les élections locales prévues en mars 2014, Ousmane Badiane a laissé entendre que c’est cela l’idée. Mais à quelle date exactement ? « Je ne sais pas » dit-il. Mais il est convaincu que cela pourrait avoir des incidences sur les élections, si le travail ne peut pas se faire dans des délais importants qui puissent permettre une bonne organisation des élections. « Si on devait redéfinir la carte administrative et la carte des collectivités locales, cela veut dire que c’est une nouvelle architecture institutionnelle qui sera mise en place. Il y aura un bouleversement de notre ordonnancement institutionnel, est-ce que cela peut se terminer avant les élections » se demande-t-il.  

 

HAROUNA FALL

 

Comité national de pilotage de la réforme de la Décentralisation

Ismaël Madior Fall aux commandes

Sur proposition du ministre de l’Aménagement du Territoire et Collectivités locales, le chef de l’Etat Macky Sall a pris un décret n° 2013-581 en date du 29 avril 2013, portant création du comité national de pilotage de la réforme de la Décentralisation. Composé de 20 membres, avec à sa tête le ministre conseiller juridique du président, Ismael Madior Fall, le comité de pilotage est chargé de superviser les travaux du comité technique, des commissions thématiques et des cadres régionaux de partage de la réforme de la décentralisation créés par arrêté du ministre. Il est chargé notamment d’examiner, de donner des avis et de valider, le cas échéant : les termes de référence de la réforme, le bilan diagnostic de la mise en œuvre de la décentralisation, les conclusions des différentes commissions thématiques et les avant projets de texte législatifs ou réglementaires préparés entre autres.

H. F

 Liste des 20 membres

Ismael Madior Fall (Professeur de Droit Public) Président, Aly Lo, (Président de l’Union des associations d’élus locaux) Vice-président, Médoune Diama Cissé (Administrateur civil principal), vice-président, Ibrahima Thioye (Secrétaire général du Cese), rapporteur général, Mayacine Diagne ( Enseignant, chercheur en Droit Public) rapporteur, Pape Mor Ndiaye (Administrateur civil principal), porte-parole, Mme Awa Guèye Thioune (Juriste), porte-parole, Bachir Kanouté( secrétaire exécutif Enda Ecopop) porte-parole, Cheikh Seck ( député à l’Assemblée nationale) membre, Aliou Niang (Président Associations des régions), Baidy Agne (Cnp), Mansour Kama (Cnes), Mouhamadou Mbodj (Forum Civil), Amacodou Diouf, président du Conseil des Ongs, Léopold Wade (Dg de l’administration terrotoriale), Abdoulaye Dieng (directeur général de la comptabilité publique et du Trésor, Samba Diop ( administrateur civil principal, conseiller spécial du Pm) et le président de l’Intersyndicale des travailleurs des collectivités locales.

H.F

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