Un bijou
à l’agonie
Couvrant
une superficie de plus de 900 000 hectares, le parc du Niokolo-Koba offre un
paysage riche et très varié, où se concentrent presque toutes les espèces
végétales et animales des savanes de l’Ouest africain. Faute de moyens conséquents (comme l’explique
le capitaine Mamadou Sidibé, par ailleurs conservateur du PNNK : lire
entretien) pour
faire aux multiples agressions dont il fait l’objet, le parc est en voie de
mourir de sa belle mort. Voyage dans cet
univers à la fois paradisiaque et sauvage.
Jeudi 24 février 2011. Après une nuit
entière de voyage pour rallier Tambacounda, distante de 500 Km de Dakar, nous
arrivons à destination aux environs de 5 heures du matin. Après quelques heures
de somme à l’hôtel Asta Kébé, nous reprenons la route à 11 heures, direction
Niokolokoba. En cette matinée ensoleillée du vendredi, la température avoisine
les 35°. Les travaux en cours à la sortie de Tamba vers Kédougou, nous emmène à
emprunter une piste sur quelques 10 km avant de reprendre le goudron. A cette
période de l’année, tout est sec. La paille est à perte de vue. Les animaux en
divagation s’en donnent à cœur joie. Après quelques trente minutes, le premier
village nous ouvre les bras. Amdallaye
avec ses cases. Puis Missirah et ses ânes. Wassadou et son pont. Et enfin Dialakoto
et Daresalam où nous faisons halte au premier poste de garde avant d’entrer
dans la zone du parc Niokolokoba. Nous en profitons pour émettre des appels
d’urgence. Puisque une fois cette le portail franchi, nous serons dans une zone
de non-couverture. Nous entrons dans la forêt. Et c’est parti pour 40 km de
pistes. D’enfer. Le véhicule roule presque au ralenti tellement l’état de la
piste est chaotique. A la moindre fausse manœuvre, le pire peut arriver. On
roule la peur au ventre. Entre le poste de départ et l’arrivée à Simenti, on
peut tomber à tout moment. Après quelques minutes de piste, nous voici à Badi.
Nous tombons sur un groupe de de Cob de buffon. Puis la « Boucle du
décembre ». On l’appelle ainsi, explique un
agent du parc parce que « Nous sommes tombés sur une dizaine de
braconniers qui sont entrés dans le parc au niveau de l’ancien poste de Badi en
1997. Nous étions une brigade de quinze personnes et deux chefs de groupe. Nous
avions fait une patrouille de 15 Km et nous étions tombés sur ces braconniers.
Ils étaient armés. Nous avons échangé des tirs avec lui. Nous avons arrêté
certains d’entre eux avec leur matériel. Le chef a fait un tir de sommation,
ils ont riposté. Après il y a eu des échanges de tirs qui s’est soldé par des
blessés de part et d’autre » se souvient-il. Puis la marre de Simenti où les
animaux très tôt le matin et au coucher du soleil viennent s’abreuver. C’est le
moment choisi pour les touristes et autres visiteurs locaux pour venir
contempler le beau paysage et les belles images qu’offrent ces animaux dans
leur milieu naturel. Après deux heures de pistes, nous arrivons au poste de
Simenti. Où les singes nous réservent un accueil sympathique. Le visiteur qui
débarque dans cet endroit, a l’impression que ces singes sont élevés par les
agents du parc. « Non, ils viennent de la brousse » nous
signale-t-on. « Et gardez bien vos bagages. Sinon ils volent vos
affaires » avertit un agent qui est venu nous aider à déposer nos bagages.
Nous sommes dans un autre monde alors. Rien que des arbres touffus. Les chants
des oiseaux bercent le visiteurs. Et invite au repos. « Inscrit comme site du Patrimoine mondial et Réserve
de la biosphère internationale, le parc compte près de 350 espèces d’oiseaux et
80 espèces de mammifères, notamment des lions, des léopards et quelques
éléphants. On peut y trouver également des antilopes, des singes, des
phacochères, des babouins, des buffles, ainsi que des hippopotames et
crocodiles dans les cours d’eau » nous confie un agent du parc. Le
lendemain, une visite de certains coins est organisé avec les autorités. Le
long de la route qui nous mène au Guet de Damanta, les paysages sont
très contrastés : une savane boisée, une immense étendue marécageuse, forêt
luxuriante, grandes plaines herbeuses… Le paysage est beau. Malgré les
secousses liées à l’état piteux de la piste, nous tenons bon. « Près de 70
espèces de mammifères vivent dans cette zone protégée : antilopes,
hippopotames, phacochères, babouins… On pourra aussi voir des crocodiles, des
poissons, et 330 espèces d'oiseaux, dont les oies de Gambie, les grues
couronnées, les jabirus » nous apprend-on durant la visite. Les problèmes
du parc sont nombreux. Selon le Sous
lieutenant Aliou Diallo : « Le parc est confronté au braconnage, la divagation du bétail,
extraction de sable, exploitation de rôniers et de bambou ». Et pour permettre aux agents de contourner
ces problèmes, dit le lieutenant Sous lieutenant Diallo : « Il faut
beaucoup de moyens financiers et humains. Pour une bonne surveillance du parc,
il nous au moins un avion. Nous avons des véhicules 4X4. Mais ils ne sont pas
adaptés. Il nous faut d’autres moyens pour parer à cela. Il nous faut au moins
des avions et des hélico, pour au moins chaque semaine faire un survol ».
Abondant dans le même sens, le Sous-lieutenant Sow, adjoint chef de zone Est,
explique : « Nous sommes aussi des problèmes de mobilité. Il y a des
marres envahis par des espèces végétales. Il nous faut de bonne pistes pour
faire reculer l’ennemi ». Et de poursuivre : « Le parc est divisé en
trois zones, la zone Est, la zone Centre et la Zone Ouest. Le parc est divisé
en 17 postes de garde. Il y a la corniche qui occupait 4 à 5 postes
stratégiques, qui sont fermés actuellement. La grande faune s’est repliée vers
cette zone. Actuellement les braconniers font la chasse là-bas, c’est une zone
un peu distante de nos zones, c’est vers la frontière avec la Guinée »
renseigne-t-il. Autre problème relevé par le sous lieutenant Diallo, les
populations aux alentours du parc. « Tant que les populations qui sont
autour du parc, restent dans la situation de pauvreté, ces populations vont
continuer à entrer dans le parc pour trouver des moyens de survie. C’est bien
de donner de l’argent au parc, il faudra penser à ces populations pour que le
braconnage cesse ». Avant de confier avec une lueur d’espoir sur le
visage : « Il y a de cela deux semaines Ndlr : le 10 Février
2010, nous avons vu des éléphants.
Depuis dix ans nous n’en avions pas vu ». Cela, dit-il, «signifie
qu’il y a de l’espoir».
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