mercredi 10 juillet 2013

Investissement dans l’agriculture: Où sont passés nos 10%?


10 ans après, 10% moins de 10 pays : l’amère réalité de la déclaration de Maputo

Le 10 Juillet 2003, les Chefs d’Etat et de Gouvernement, membres de l’Union africaine,
signaient la déclaration de Maputo les engageant à allouer au moins 10% de leur budget
national à l’agriculture et à l’élevage, à l’horizon 2008. 10 ans plus tard, le constat est amer !
L’ensemble des pays de la CEDEAO dispose de Plans Nationaux d’Investissement Agricole,
mais seuls sept pays africains (Burkina Faso, Niger, Guinée, Sénégal, Mali, Malawi et
Ethiopie) ont atteint, entre 2003 et 2009, l’objectif des 10% d’investissement dont cinq
pays en Afrique de l’Ouest. Le Ghana a intégré depuis 2006 ce peloton de tête. Le Burkina
Faso est le pays qui a engagé proportionnellement le plus de fonds dans l’agriculture sur la
durée et qui a atteint le seuil de 6% de croissance du PIB agricole entre 2001 et 2006.
« En 2003, les Chefs d’Etat africains ont suscité de nombreux espoirs en remettant
l’agriculture au coeur de l’agenda politique continental. 10 ans plus tard, la barre symbolique
de Maputo reste toujours un objectif à atteindre pour près de 47 Etats africains sur 54. Les
dirigeants africains doivent tenir leur engagement voire dépasser ces 10%, mais ils doivent
surtout revoir la qualité des investissements» affirme M. Aliou Ibrahima, Secrétaire
Général de l’Association pour la Promotion de l’Elevage au Sahel et en Savane
(APESS).
Ainsi, alors que la CEDEAO vient de faire le bilan des Plans Nationaux d’Investissement
Agricoles et bien qu’ils reconnaissent le rôle et le potentiel des exploitations familiales, peu
de pays disposent de programmes spécifiquement centrés sur ces exploitations. A l’inverse,
une grande part des budgets agricoles est consacrée à un nombre restreint de programmes
dirigés principalement vers les grandes exploitations.
Pour Dodo Boureima, Secrétaire Exécutif du Réseau Billital Maroobé (RBM) « il est
inconcevable de parler d’investissement de qualité sans l’élevage. Au Sahel, l’élevage
représente une partie importante du secteur agricole mais ne reçoit qu’une part marginale
des financements agricoles. Au Niger, il contribue pour près de 22% des exportations et est
considéré comme l’un des secteurs qui contribuent le plus à la réduction de la pauvreté.
Malheureusement, il demeure le parent pauvre du secteur agricole avec 1,7% du budget
national en 2009 ».
En Afrique de l’Ouest, les femmes contribuent à la production de 80% des denrées
alimentaires de base alors que seulement 10% d’entre elles accèdent aux crédits agricoles.
En matière de propriété foncière, ce sont encore elles qui sont les plus défavorisées.
Seulement 8% d’entre elles ont accès à la terre. Elles pourraient augmenter les récoltes de
leurs exploitations agricoles de 20 à 30% si elles bénéficiaient du même accès aux
ressources productives (la terre, les engrais, les semences, les crédits agricoles et autres)
que les hommes. C’est ce type d’investissement qu’il faut promouvoir.
D'ici 2030, la population ouest africaine devrait doubler pour atteindre 500 millions
d’habitants, la demande en produits agricoles et d’élevage va augmenter. Ceci représente
une extraordinaire opportunité de sortir les populations les plus vulnérables de la faim. Il ne
faut surtout pas la manquer. En ce 10e anniversaire de la déclaration de MAPUTO, la
campagne CULTIVONS lance un appel fort à tous les chefs d’Etat africain pour investir
plus et mieux dans l’agriculture, et notamment l’élevage.
Eric Hazard, responsable de la Campagne CULTIVONS pour l’Afrique de l’Ouest, de
conclure : « En faisant de l’investissement qualitatif dans l’agriculture une priorité, les
gouvernements pourront assurer la souveraineté alimentaire de l’Afrique de l’Ouest et le
bien être de ses populations. L’alimentation est un droit, pour le mettre en oeuvre il faut
investir plus et mieux dans l’agriculture familiale, et notamment l’élevage qui à eux deux
contribuent à près d’un tiers du PIB et emploie 60% de la population ».
La campagne CULTIVONS va poursuivre son travail de sensibilisation, d’information et de
plaidoyer, pour qu’un large public interpelle les Chefs d’Etat et de gouvernement sur la
nécessité de disposer d’un nouvel engagement de Maputo, basé sur la qualité des
investissements, pour la mise en oeuvre des politiques agricoles et de sécurité alimentaire
en place!
 L’objectif de la campagne CULTIVONS est de permettre aux personnes vivant dans
la pauvreté de participer à la gestion globale des terres, de l'eau et du climat afin
qu'elles puissent cultiver et acheter suffisamment et de façon pérenne de la
nourriture. Les droits des femmes et l'égalité des sexes sont au centre de la
campagne. Les membres de la campagne CULTIVONS en Afrique de l’Ouest sont:
Réseau Billital Marobe, Poscao, IPAR, RACAO, APESS, WILDAF et OXFAM.

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